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Woodpigeon & Belle Arché Lou

Je vous ai déjà parlé des amitiés nouées en musique, mais spécifiquement sur la route ? Certes, ce n'est pas notre lot quotidien mais ça arrive, parfois. Des amitiés étranges, soudaines,...

Je vous ai déjà parlé des amitiés nouées en musique, mais spécifiquement sur la route ? Certes, ce n'est pas notre lot quotidien mais ça arrive, parfois. Des amitiés étranges, soudaines, fugaces; on croise des gens, on fabrique des moments d'images et de sons, on discute beaucoup. C'est passionnant, et puis on se perd de vue, jusqu'à se recroiser, et retrouver à nouveau cette bizarre magie, cette fraternité chancelante.

Mark est l'un de mes amis comme cela. Peu croisé, mais énormément apprécié. Nous voulions le faire jouer dans l'intimité de l’appartement, à Paris. Je cherchais quelque chose d'un peu spécial, un autre groupe avec qui partager l'affiche et quelques chansons. Nous avions pensé à Belle Arché Lou, un trio instrumental emmené par Alexis dont on vous parlais il y a peu. Alexis, je le connaissais sans le connaître, par d'autres connaissances, lointaines et pourtant fortes, elles aussi. J'étais ravi de voir Alexis et Marc réunis, ça me semblait plutôt coller, en fait.

En 2015, nous avons eu beaucoup de choses électriques, électroniques, pétaradantes et musclées, ici. Alors se plonger dans les images et les sons de cette soirée, ça faisait du bien, ça procurait de l'air frais, ça m'a rappelé la soirée de poche Bowerbirds, un truc d'innocence bête, mes premiers trucs avec cette vénérable Blogo. Il y avait quelques amis, débauchés pour filmer ça avec les moyens du bord, enregistrer sur un coin de table, j'avais fait des cakes salés, les gens avaient apporté à boire. Qu'importe si je donne dans le Delerm et sa première gorgée de bière ; ce soir-là ça sonnait vrai, ça sonnait doux.

 

Nous avions fait une discrète campagne pour proposer à une quarantaine de personne de venir, choisies principalement au hasard parmi les mails reçus. Je me souviens avoir découvert, d'abord furieux puis finalement conquis, qu'un groupe d'amis avait trusté quasiment toutes les places de Woodpigeon par une attaque qui ressemblait au déni de service : sous tout un tas d'identité ils étaient parvenus à joyeusement investir l'appartement de François et ses collocs. Qu'importe, ils avaient visiblement apprécié cette première partie qu'ils découvraient, et ils attendaient religieusement Mark.

Ce dernier m'avait demandé de filmer « An Entanglement of Weeds », que je n'avais jamais entendu – bravo l 'ami fugace – et qui allait devenir mon opium triste de ces 2 dernières années. Deux ans ? Pourquoi avoir autant attendu pour cette jolie fête simple ? À cause de ce morceau, trop beau dans l'interprétation, mais filmé à une seule caméra car notre manque de préparation et l'absence totale de budget avait temporairement mis hors service les deux autres. À cause du triturage de cerveau pour le garder coûte que coûte, le refilmer, le re-éclairer, monter le seul plan séquence que nous avions, ce fragment précieux que nous avons exploré jusqu'au pixel, sans en cacher les faiblesses.

Il en ressort quelque chose d'étrange. Il en ressort un truc âpre, un peu cassé. Mais la chanson, si belle, parle d'un fait divers si sordide, une histoire horrible, qui continue de me hanter.

Car la ritournelle "An Entanglement of Weeds" raconte ce fait divers anglais d'un garçon qui a plongé pour sauver son ami de la noyade, et qui s'est finalement retrouvé prisonnier des algues de la rivière. Dépouillée, bouclée sur elle-même comme un serpent s'entre-dévorant, la chanson joue et j'en perds les mots.

 

Tout s'est bien fini, cakes, chansons, collaborations. Belle Arché Lou a rejoint Woodpigeon pour Robin Song ; avec Mark nous avons discuté jusqu'à tard, nous nous sommes quittés, nous nous sommes revus, il a refait un disque, son plus beau disque, il va sortir. J'ai aussi revu Alexis, nous avons fait une autre vidéo pour un autre projet, et il va partir autour du monde. Finalement, deux ans c'est court.