Il y avait bien les incontournables Baba Zula, quelques vieilles légendes en perte de vitesse où les jeunes musiciens dit 'ethniques' du label Kalan Music (Ahmed Aslan, Ismail Altunsaray, Aysenur Kolivar...) qui étaient en fait des musiciens montés à la grande ville depuis la riche Anatolie. Mais pour ce qui était de développer justement de nouveaux sons, de 'nouvelles traditions' basées sur les vieilles musiques d'une des plus riches cultures au monde, peu de choses vraiment faisaient sens. C'était l'été 2011 et Istanbul ne vivait pas un âge d'or, loin s'en faut - la vie nocturne avait beau être en perpétuelle explosion, la jeunesse créative se trouvait dressée contre une bonne partie de sa propre culture et les récentes décisions du gouvernement de Erdogan avaient contribué à aviver un peu plus les tensions. La relation à avoir au riche passé turque était en plein questionnement.
Alors je tombais par hasard sur le concert de Seni Gormem Imkansiz, au milieu d'une foule d'autres groupes indies-rock. Elles me firent d'abord penser à Fuck Buttons pour le dispositif scénique, assises l'une face a l'autre, mais leur son rappelait plutôt une version turque d'un cauchemar d'enfant moderne, une tentative de marier vieilles mélodies turques et éléments électroniques. Mes amis stambouliotes ne goûtaient pas trop leur son mais on apprend à se fier à ses intuitions.
Et on a bien raison d'insister dans les méandres sonores de Constantinople quand il s'agit de trouver de telles perles - on aurait du se méfier, Seni Gormem Imkansiz signifie 'Il est impossible pour moi de te voir'.