Il n’est pas nécessaire de beaucoup les pousser, les cinq brouilleurs de piste se prêtent facilement au jeu. « Jimmy » cette histoire tout le monde la connaît, et Moriarty, sorti tout droit d’un roman de Jack Kerouac, sait les narrer comme personne. Avec une élégance intemporelle, la voix profonde de Rosemary résonne au cœur de la nef et revisite le titre dans une version brute et grandiose, pas loin du blues rural des plaines américaines.
A y regarder de près, Arthur à une guitare incroyable, une guitare tchèque en métal « de 1957 » paraît-il. Quand on sait que la famille Moriarty tire ses origines du théâtre, et plus particulièrement celui de Jérôme Deschamps et Macha Makaïeffe on ne s’étonne pas de découvrir un harmonica, des grelots ou une caisse claire en forme de valise. La scène du cabaret folk « Lovelinesse » aura lieu dans un confessionnal éclairé à la bougie.
La nuit tombe vite pendant l’hiver. Les rayons de lumière se sont maintenant décrochés des vitraux. Peu importe, Rosemary s’y plaît et entame une reprise de Depeche Mode. Là, au milieu d’une église perdue dans l’obscurité, « Enjoy the silence » prend une dimension religieuse, quasi-mystique, troublante même. Tout s’imbrique avec une aisance naturelle, la scénographie est parfaite, et le groupe improvise avec brio. Avec une voix à réveiller les morts, la diva entreprendra ensuite une marche funèbre a capella, une ronde de nuit sublime et envoûtante, qui semble avoir traversé les siècles.
Brouilleurs de pistes et formidables conteurs d’histoires, Moriarty jouait quelques heures plus tard au théâtre, avant de repartir encore pour quelques mois, sur la route.