C'est Pietro Amato, le joueur de cor de The Luyas et Bell Orchestre, et anciennement 1/14e du groupe Arcade Fire, qui m'a d'abord parlé de Joe. Il ne tarissait pas d'éloges à son égard, et ne cessait de revenir sur son incroyable talent de multi-instrumentaliste. Je suis allé au Barfly, dans le quartier du Mile End à Montréal pour juger sur pièce, et son jeu m'a carrément scié. Une espèce de petit blondinet grattait sa mandoline au milieu d'un groupe de vétérans du bluegrass quarantenaires, pour la plus grande joie de la foule compacte amassée dans la salle.
Ma session avec Joe n'était pas du tout prévue. Je faisais mon sac pour rentrer à Toronto et je l'ai appelé après coup, sachant qu'il avait fait de la route, et ça tombait bien puisqu'il avait un peu de temps plus tard dans la soirée.
Jessie a chopé la pedal steel, Joe la six cordes et un ampli attaché sur un diable, et on est partis direction les allées de Van Horne. Intrépide dans l'âme, Jessie a passé la tête au-dessus d'une barrière pour demander, en français, à un type sans pantalon assis sur sa fenêtre et qui se demandait bien ce qu'on pouvait manigancer, si on pouvait lui piquer un peu d'électricité. Mission accomplie, Joe s'empare alors d'une mélodie entêtante et familière et régale le voisinage.
Suite et fin devant le seul fleuriste de la ville ouvert assez tard pour participer à nos aventures, et, plus tôt dans la semaine, d'assez bonne heure pour surprendre Arlene avec des marguerites d'anniversaire. Cette fois c'est une chanson à peine achevée que Joe partage avec nous au milieu des lys, roses et autre lilas parfumés que beaucoup s'arrêtent alors pour acheter, le sourire aux lèvres en écoutant le picking assuré et les sobres paroles de Joe.
- Derrick Belcham, traduit par Nora Bouazzouni