Isaac n'était pas de très bonne humeur, convaincu que rien n'allait se dérouler comme il le voulait. J’étais à la fois épuisée et impatiente comme une gosse de l’entendre chanter. On fumait tous les deux clopes sur clopes. Je ne sais pas si le shampoing sec qu'il s'est fait à la terrasse du café l'a aidé à se détendre, mais c'était une drôle de première sur un tournage de Concert à Emporter.
Si ce n'est cette saloperie de temps automnal, on n’aurait pas eu de mal à le filmer dans un cadre bucolique, à sublimer son visage de Hanson / Macaulay Culkin pré-drogues, et à ne compter que sur son allure de gravure de mode, pour capter le regard de la caméra.
Sauf qu’Isaac est très loin de se réduire à sa seule belle gueule.
Et c’est au plus près de lui, de cette voix brisée, profonde, bien plus âgée et égratignée que son propriétaire, au plus près de cette émotion brute, à la fois douce et juvénile, presque grunge, qu’on s’est lové pendant qu'il chantait "Last Words" et "Terrified" sans effet, sans artifice, seul à la guitare.