Charles Bradley arrive, humble, vous regarde dans les yeux, chuchote quelque chose comme un merci, et vous prend dans ses bras. Il ne sait toujours pas pourquoi vous êtes-là.
C'est un hiver qui n'en finit pas, dans un quartier engourdi par le froid, dont les lumières sont déjà allumées alors que l'après-midi est à peine entamée. Un pub chaleureux, et aucune idée d'où nous allons aller. Jusqu'à ce que le manager de Charles demande si on connait une église dans le coin, que l'on se souvienne de cette projection des films de Moon à St-Merry, juste à côté. Julien, qui s'en occupe, répond tout de suite, il arrive juste, venez donc.
A peine entré, Charles Bradley a les yeux humides. Il dit qu'il est chez lui, qu'il connait ce lieu. Il avance, il nous oublie, il a les yeux tournés vers ce Jésus au fond. Il prie, pleure, et c'est un comme un paradoxe, lorsqu'il chante, il chante pour nous, mais aussi, surtout, pour Dieu, il est excessivement là et comme ailleurs, attentif et transcendé à la fois.
On connait l'histoire de Charles Bradley. L'histoire d'un succès mérité arrivé avec 40 ans de retard, l'histoire d'un homme dont le rêve devient préhensible alors que l'espoir était éteint. Et, donc, l'histoire d'un homme éternellement redevable à la vie, débordant de sincérité, de vie, parce qu'il y a tant d'énergie à dissiper, tant de beauté, de moments à rattraper.
Des instants à la valeur infinie, comme ce sanglot au début de la chanson, sans doute la chose la plus bouleversante que j'ai pu entendre en six ans de Concerts à emporter.