Le Canadien jouait en début de soirée, non loin de la plage, et c'est avec une joie non-dissimulée et presque un peu de fierté que nous étions arrivés - miracle - en avance à son concert.
La salle était bondée de gens trépignant d'impatience, quand soudain, Andy s'était installé, seul, derrière un clavier. Étrange : on croyait jusque-là que le jeune homme était à la guitare et accompagné d'un groupe ? Peut-être le Canadien avait-il décidé de faire un concert solo au piano ?
Premier morceau : le doute s'épaissit. Mais quelle est donc cette mélodie de supermarché qui s'échappe du clavier du jeune premier ? Et cette voix de chanteur de kermesse ? Pouvait-on s'être trompé à ce point ?
Autour de nous, personne ne bronche. Les gens dansent, chantent les paroles d'une pop dégoulinante et mièvre, à mille lieues des comptines gracieuses de Shauf.
On sonde un collègue par texto :
"Euh, ça va pas du tout là Andy Shauf ?"
- "Tu rigoles ? C'était hyper beau."
"Non mais là, c'est insupportable cette pop de vendeur d'encyclopédies."
- "Mais, tu es à quel concert ? Celui d'Andy est fini depuis 2h."
On ne saura jamais devant qui on s'est retrouvé, par accident, ce soir là. Une chose est sûre : ce n'était pas Andy Shauf, dont le concert avait été avancé à la dernière minute dans une autre salle du festival - pas merci le Great Escape et le wifi quasiment inexistant.
Rendez-vous raté donc, mais pas totalement perdu puisque c'est par une magnifique et brûlante journée d'août que nous avons finalement emmené Andy et ses trois complices se promener dans les rues presque désertes de Paris pour confirmer que le jeune homme est un songwriter précieux qui raconte la vie (des autres) dans des popsongs tout en rondeurs et des rêveries folk dont la mélancolie n'éclipse jamais totalement le soleil.
Ils y ont joué "Jenny Come Home" et "The Worst in You", nouveau titre de leur album à venir en mai, avant que le jeune Canadien empoigne une guitare et livre une version solo dépouillée de "My Dear Helen". Et dire qu'on aurait pu totalement passer à côté de la beauté des chansons d'Andy Shauf à cause d'un bête changement d'horaire et d'un sacré malentendu.