Ce premier soir, il y avait, entre autres, The National et Aloe Blacc au programme. Ce dernier avait fermé le banc. Il nous avait promis de nous interpréter quelque chose après son concert. Il a fallu attendre un peu plus que cela : caché derrière la fausse armoire d'une salle, le backstage était trop luxueux et confortable pour ne pas inciter à la paresse. Aloe s'y détendait avec quelques amis, et nous faisait gentiment poireauter. Il aura fallu que je me m'agenouille, réussisse à le faire rire pour qu'il se lève. Trois mots à l'oreille de son pianiste, un petit geste pour ses cuivres, nous nous dirigeons dans le lobby.
Là, dans les larges canapés, sous des murs surlesquels étaient projetées des nuées d'oiseaux, paressaient tous ceux qui ne voulaient pas quitter cette soirée. Ils étaient nombreux, ils parlaient forts, n'ont pas même remarqué que nous nous installions. Le piano à queue était devant une fenêtre, on voyait le métro aérien passer à intervalles réguliers. J'ai hurlé pour avoir l'attention de ce public de fin de soirée, tout en me rendant compte qu'Aloe, qui s'était accoudé sur le piano, ne nous avait pas dit un mot de ce qu'il comptait faire.
Le malin. Nous nous attendions à tout sauf à cela. Qu'il reprenne 'Green Lights' cette chanson que nous pensions ne plus pouvoir écouter pour cause de travail intensif, sans que nous puissions la reconnaître. Ce soir là, nous avons eu la confirmation qu'Aloe Blacc était un interprète d'exception. Ecoutez le public s'enflammer, vibrez à 4'00 quand il part en vrille. C'était juste fou.