La première fois que j'ai rencontré Adam Repucha, il était a mes côtés dans la foule d'un petit concert dans le centre de Varsovie. Un musicien américain était de passage, dont personne ne connaissait le nom, mais tout le monde s'était refilé l'info ('Un Américain est en ville!', ça sonnait un peu comme ça, avec toute la fraîcheur qui vient avec). A un moment du concert, le musicien américain en question demanda a la foule, 'et vous, vous feriez quoi d'une machine a remonter dans le temps' - ça devait être sans doute être en rapport a sa prochaine chanson, je ne sais plus trop - et Adam de répondre aussi vite que possible, 'jouer une chanson que je n'ai pas encore écrite!'. J'ai alors décidé que lui donner un petit film était une bonne idée.
J'avais découvert Adam via une pauvre petite vidéo Youtube envoyée quelques jours avant de débarquer en Pologne. Mon seul contact sur place, Magdalena, m'avait refilé le lien de ce jeune mec qui n'avait encore rien sorti. Je voulais le rencontrer, séduit par le ton de sa voix, et par ce corps flottant, si rimbaldien. Et surtout, filmer une musique qui se chante en polonais, cette langue si rude aux mots pourtant.
L'arrivée a Varsovie s'était faite en bus, ou en train, je ne sais plus trop, depuis Berlin, ou j'avais passé deux jours a filmer Bruno S, qui devait disparaître deux semaines plus tard. Varsovie était une petite étape avant Cracovie, qui pourtant marque les coeurs bien plus profondément - mais pensez donc, l'histoire du monde qui s'écroule fait l'histoire du monde qui se construit, et il est évident que la vie ne se trouve pas dans les musées. A voir aussi si l'on cherche la vie ou sa représentation.
J'aurai aimé filmé plus longuement avec Adam, prendre le temps de se balader a travers Varsovie. On voulait aller en haut du Pekin notamment, le palais culturel soviétique si hai et pourtant, si symbolique de la nouvelle jeunesse polonaise, qui l'utilise comme terrain de jeu.
Mais la pluie s'est mêlée a l'affaire, comme si elle s'imaginait indispensable compagnon de jeu. Peut être qu'elle avait raison.
Quelques jours plus tard, en train de retour d'Auschwitz, j'écoutais la musique de Adam en regardant les paysages polonais défiler. Ce petit mec inconnu et ses notes mélancoliques, sa voix si douce, ses doigts qui filent, tout faisait sens dans mon interprétation naïve d'un passé si intense. Adam était le héros polonais moderne.
La prochaine fois que je repasse par là, j'irai trouver Ewa Demarczyk, promis.